Qui tient le volant de votre vie ?

                Celui qui maîtrise sa vie est plus grand que celui qui prend des villes.
                                                                                            Proverbes 16, 32 


 COMBIEN MAÎTRISENT RÉELLEMENT LEUR VIE ? L’autre jour, j’entendais quelqu’un s’exclamer : «Je n’en peux plus de boire!» Va pour l’alcool, mais, au fond, ne sommes-nous pas tous alcooliques de quelque chose? Les dépendances ne se comptent plus. La psychologie en découvre une nouvelle chaque mois. Le «mal du siècle», paraît-il. Certaines formes de dépendance sont telles qu’elles empoisonnent la vie tout entière. Or, que vaut la vie, quand on n’en a pas la maîtrise?


Maîtriser sa vie, c’est beaucoup plus que de dire : «Je performe dans mon travail, je joue bien au golf, j’excelle au violon, je suis un vrai cordon-bleu, je sais recevoir des amis, etc.» Il existe une énorme différence entre maîtriser un sport, un art et maîtriser sa vie ou son destin. La grande chanteuse Dalida avoua un jour : «J’ai réussi dans la vie, mais je n’ai pas réussi ma vie.» Elle s’est suicidée…!

Combien de personnalités, politiciens, artistes, vedettes brillent dans le firmament de la notoriété, s’illustrent sur toutes les scènes du monde, mais croupissent lamentablement dans leur vie privée, la plupart du temps sous l’effet d’une dépendance quelconque : alcool, drogue, jeu, sexe. Combien de célèbres personnages ont été dominés par leur démon intérieur? Il existe, en fait, un grand nombre de personnes, de toute condition, qui éprouvent une profonde division à l’intérieur d’elles-mêmes. C’est comme si elles ne s’appartenaient pas complètement. Anselm Grün, psychanalyste allemand, dans son livre Ce que je veux je ne le fais pas, fait le constat que «de plus en plus, les gens ont le sentiment d’être divisés en eux-mêmes, tiraillés en tout sens dans leur travail, leur famille, leur communauté. Ils cherchent la paix intérieure et ils ne la trouvent pas.» Bref, ils ne maîtrisent pas leur vie. Ils ne sont pas complètement aux commandes de leur existence.

Or, il existe une réalité incontournable: le point de départ de la maîtrise de sa vie tient d’abord dans cette prise de conscience que nous avons tous une problématique personnelle à gérer ou à assumer. Celle-ci peut concerner soi-même, sa famille, son métier, sa profession, ou encore se vivre sur un lit d’hôpital, dans un fauteuil roulant, dans une prison, dans l’enfer de l’alcool, de la toxicomanie, du jeu ou des médicaments. Chacun a un domaine précis, dans lequel s’applique cette loi inexorable : on ne peut accéder à tout le territoire de sa vie, si on ne fait pas la conquête d’un champ en particulier, en l’occurrence celui qui influence le plus négativement nos comportements. Il est étonnant de constater jusqu’à quel point le toxicomane, le dépressif, le violent, pour ne citer que ces cas, voient leur vie personnelle, familiale, sociale et professionnelle transformée radicalement quand ils ont suivi avec succès une thérapie. C’est leur existence entière qui se trouve irradiée par le changement effectué dans un secteur précis, mais combien important de leur vie.

Heureusement, les moyens ne manquent pas pour reprendre la gouvernance de sa vie. Il existe ici une floraison impressionnante d’approches, de techniques, voire de recettes. Et puis, la nature ne nous a-t-elle pas dotés de merveilleuses ressources? Certaines agissent comme un gouvernail en profondeur, d’autres comme un  souffle invisible qui dirige à notre insu notre vie. Il s’agit de ne pas laisser ce potentiel en veilleuse.

Jean-Paul Simard

 

Renaître !

Dans la panoplie des souhaits que l’on peut faire à quelqu’un y en a-t-il un de plus beau, de plus pertinent que celui de renaître? Un souhait à saveur évangélique, puisqu’il répond à la célèbre invitation de Jésus à Nicodème : Renaître d’en haut. Mais qu’est-ce que renaître?


Pour plusieurs, la renaissance évoque un phénomène bien particulier : celui de la réincarnation. Là-dessus, précisons tout de suite que le souhait que je formule ici n’a rien à voir avec cette hypothétique forme de renaissance dont on n’a rigoureusement aucune preuve. Renaître réside bien plutôt dans une attitude aussi simple que géniale et qui rejoint en même temps l’une des plus grandes dynamiques de la vie : RE-COM-MEN-CER!

L’invitation à recommencer est motivée par la nouvelle année, mais bien plus encore par la vie elle-même, faite d’alternance de succès et d’échecs. Et les occasions ne manquent pas. Vous vous souvenez sans doute de la phrase d’un psychologue bien connu : Aimer, perdre et grandir…? Une phrase qui peut s’appliquer à bien des domaines de la vie : travailler, perdre et grandir; investir, perdre et grandir; boire, se droguer, jouer, perdre et grandir; divorcer, perdre et grandir, etc. Nous pourrions multiplier ainsi les domaines où peut s’appliquer cette dynamique étonnante qui s’appelle renaître des pertes de la vie.

Au cours d’une année, nous subissons quotidiennement des pertes de toutes sortes. Qui n’est jamais victime dans sa vie? Qui peut affirmer ne jamais échouer ou rater quelque chose? La plupart du temps, le malheur est imprévisible. Il peut surgir à tout instant des sentiers de la vie ou se positionner sur la trajectoire de notre destin, défaisant sans discernement nos rêves les plus beaux.

Quelqu’un m’avouait un jour : «Il y a deux ans, tout allait bien. Aucun problème familial ni professionnel. Et puis, brusquement, j’ai vu s’effondrer ce que j’avais mis quinze ans à construire.» Une autre personne me confiait: «Un jour que j’étais dans un centre commercial, j’ai été accablé d’un désespoir si intense que j’ai cru que ma vie s’arrêtait, que mon avenir était bouché et que rien n’avait de sens.»

Un individu, fût-il équilibré, peut être amené un jour ou l’autre à un total bouleversement de son existence, à une remise en question radicale de ses valeurs personnelles. Qu’est-ce qui peut alors motiver à tenir le coup malgré les épreuves et même à survivre dans les situations extrêmes? Qu’est-ce qui peut amener à renouer avec la vie et à reprendre le fil de son histoire?

La vérité, c’est qu’il existe dans l’être humain des forces profondes qui sommeillent, de même qu’un irrésistible enracinement de la vie qui font que l’on peut survivre aux pires malheurs de l’existence. « Quand croit le péril, croît aussi ce qui sauve » a écrit le grand poète Friedrich Hölderlin. L’expérience nous enseigne que chaque malheur est accompagné de mécanismes qui sauvent. Il existe, en effet, un tel phénomène dans la vie. Pour pallier les effets négatifs de l’existence, la nature a prévu des mécanismes compensatoires de défense et d’adaptation. Toute personne possède en elle-même le potentiel nécessaire pour redonner un sens ou une signification à son existence quand elle l’a perdue. Toute personne est capable de résoudre ses conflits ou d’apprendre à vivre avec eux. Il est même possible d’atteindre par moment des états de conscience où l’on peut accomplir des miracles. C’est ainsi que chaque perte ou chaque mort porte son potentiel de résurrection. Aussi faut-il faire confiance à la vie et avoir foi en son propre chemin.

Renaître! Une fois ce mot prononcé, tout peut devenir possible. Comment dire? Nous pourrions parler ici de création, dans laquelle la vie se présente comme une succession d’états naissants, pour ne pas dire une naissance perpétuelle. C’est ainsi qu’on meurt un peu à chaque instant à ce que l’on est pour devenir autre. «Mourir pour renaître» devient ainsi l’une des grandes lois de la vie. La vie n’est pas une loterie. Elle n’est pas donnée toute faite. Pour être pleinement soi-même, on doit constamment se reprendre, se refaire physiquement, mentalement et moralement. En réalité, on passe sa vie à se mettre au monde. Voilà pourquoi la capacité de renaître est le plus grand don après la vie. 

Jean-Paul Simard

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La poésie de la vie

Dans une chronique précédente, j’évoquais la magie de la vie et son lien avec la poésie. Il n’est pas nécessaire d’écrire des poèmes pour faire de la poésie. N’importe qui, dans le contexte familier de son existence, peut se comporter en véritable poète. On sait déjà jusqu’à quel point la poésie est nécessaire à l’expression de l’amour, du romantisme et du rêve. Mais sait-on comment elle peut transformer notre existence au quotidien?

Le monde sépare volontiers poésie et réalité, comme si la poésie n’était qu’une sorte d’ornement ou de fioriture de la vie. Mais la poésie nous rappelle que la réussite de l’existence n’est pas seulement affaire de technique. Elle a besoin d’un souffle que seule la poésie peut donner. Simone Weil, cette philosophe de génie qui a étonné le monde en travaillant une grande partie de sa vie dans les usines à une époque où la technologie était rudimentaire, a écrit : «Les travailleurs ont besoin de poésie plus que de pain. Besoin que leur vie soit une poésie. Besoin d’une lumière d’éternité.» Cette lumière d’éternité, c’est l’horizon d’émerveillement que le regard poétique peut apporter sur les êtres et les choses.


Pour l’expérimenter, je vous invite aujourd’hui à vous laisser émerveiller  par toutes les petites choses qui vous entourent : savourer un bon petit plat, sentir la fraîcheur de l’eau sur votre peau en vous lavant, admirer une fleur, goûter et admirer la beauté d’un paysage, le vent, les oiseaux, la lumière, écouter le chant d’un ruisseau, contempler l’immensité des espaces sidéraux. S’abandonner au mystère de la nuit étoilée, ce qui faisait dire à Jules Renard : «Il y a de la lumière ce soir chez Dieu».  Vous verrez combien ces petits gestes font du bien à l’âme et dégagent des énergies mentales insoupçonnées!


Exercez-vous, en outre, à pratiquer le regard contemplatif, partout, sur tout ce qui vous entoure. Entraînez-vous à contempler là où nous ne faisons que voir et regarder avec indifférence. Nous ne prêtons plus attention au coucher du soleil, à la lumière qui fait étinceler les objets, au vert opulent de la nature, à l’air traversé de parfums. Quand nous nous promenons dans un parc, nous sommes plus attentifs à ce qui bouge qu’à l’appel de tous ces paysages qui nous font respirer le bonheur. S’exercer à remarquer les couleurs qui influencent notre sensibilité, les formes qui sollicitent notre attention. Même chose pour l’expression de ceux et celles qui nous entourent. Quand remarquons-nous le regard engageant ou le sourire aimable d’un voisin? Déconnectés de nos émotions, nous sommes peu conscients des bonheurs qui s’offrent à nous. Or, tout cela nous interpelle et nous rappelle, selon la magnifique formule du poète allemand Hölderlin, que «c’est en poète que l’homme habite cette terre.»

Jean-Paul Simard

 

La magie de la vie

14873883-Fleurs-des-champs-papillon-et-le-ciel-bleu-Banque-d'images - CopieON PARLE SOUVENT DE LA MAGIE DE LA VIE. On la perçoit volontiers comme une sorte d’éclair venant illuminer le ciel de notre vie, au moment où l’on en a besoin. Particulièrement dans ces moments de grande lassitude ou de morosité. Mais le plus souvent, nous nous retrouvons dans l’attente d’une magie qui ne vient pas. Attente qui va parfois jusqu’à l’obsession. Et alors c’est le doute qui s’installe. Existe-t-elle vraiment? Appartient-elle aux seuls fortunés de la vie ou est-elle à la portée de tous? Parfois, notre doute se met à dériver vers des plages moins rationnelles: faut-il connaître quelque formule initiatique pour la faire apparaître?

D’entrée de jeu, précisons que la magie de la vie ne relève pas de l’ésotérisme. Elle n’a rien à voir avec le fait de prédire l’avenir, de faire bouger des objets, de transformer les choses et les événements en un coup de baguette. Elle relève bien davantage de notre pouvoir personnel. Et ici je m’arrêterai sur une dimension oubliée, mais qui peut transformer toute l’existence : la poétique de la vie.


Précisons tout de suite qu’il n’est nullement nécessaire d’écrire des poèmes pour créer cette vision poétique. Là-dessus, j’aime bien le point de vue d’Edgar Morin quand il dit que « le véritable but de l’existence est la poésie de la vie, de vivre dans l’exaltation de soi, dans l’exaltation de l’amitié, de la fête, de la communauté ». À cette fin, il a élaboré ce qu’il appelle la philosophie de « la voie », qui consiste à se donner les moyens de réaliser la poésie de sa propre vie et, chemin faisant, de ressusciter l’espérance pour générer non pas le meilleur des mondes, mais un monde meilleur.

La «voie» évoquée par Edgar Morin passe par la découverte de la beauté du monde qui nous séduit, nous appelle, nous avive. La rencontre avec le beau nous donne le moyen de dépasser la banalité de l’existence, d’enjoliver l’ordinaire de la vie. Dans les moments difficiles ou inquiétants, aux heures les plus sombres, dans les épreuves, la beauté a cette capacité de soutenir le cœur humain et de donner la conviction que le meilleur de la vie peut être atteint. C’est ainsi que la poésie peut représenter une approche originale et exceptionnelle pour résoudre les problèmes de la vie. Elle peut intervenir dans le sentiment du vide, dans la dépression vague, dans la morosité, dans le désenchantement conjugal, familial et relationnel. Tous ces sentiments négatifs de l’existence ont quelque chose à voir avec l’absence du sens poétique de la vie.


Le rôle essentiel de la poésie est ainsi d’ouvrir à la « la joie pure d’exister». Avez-vous déjà pris conscience du don de l’être et de la vie? Dans tout ce qui a été créé, rien de surpasse la vie. La vie est le chef-d’œuvre de la Création. Il va de soi que célébrer cette vie en reconnaissant qu’elle est un don du Créateur constitue l’une des façons les plus sûres d’engendrer le bonheur. Se croire heureux d’être en vie et savourer en même temps les multiples propositions de bonheur que nous offrent nos journées. Entretenir la vision d’une vie belle, n’est-ce pas la façon la plus réaliste et la plus sûre de faire naître et d’entretenir la magie de la vie? Dans mon prochain article, je développerai un autre aspect fort intéressant de la magie de la vie (à suivre…).

 Jean-Paul Simard

 

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QUAND JE MARCHE TOUT MARCHE…

La sagesse de la marche

QUI N’AVANCE PAS RECULE ! Dans «Alice au Pays des Merveilles», la reine donne à l’héroïne ce conseil: «Tu dois courir le plus vite possible pour rester au même endroit. Si tu veux aller ailleurs, tu dois courir au moins deux fois plus vite que cela!» Il n’y a pas d’évolution sans mouvement. Sans mouvement la vie n’est que léthargie, voire régression. En ce domaine la stagnation est mortelle. La marche est une façon de s’accrocher à l’existence, de se prouver à soi-même qu’on est vivant. C’est d’ailleurs ce qui m’incite moi-même à marcher.

 


 QUAND ARRIVE LA BELLE SAISON, je sens en moi comme un appel irrésistible à sortir de chez moi et à marcher. Je me sens un peu comme les animaux de la ferme qui ont hiverné à l’intérieur des étables. Des fourmis dans les jambes. La sève de vie qui se remet à circuler. S’ajoute à cela le goût de marcher et de méditer, deux activités qui vont tellement bien ensemble. Je l’ai fait à plusieurs reprises dans ma vie. Quelle sensation !

C’est au cours de mes marches solitaires dans la nature, calme et hospitalière, que j’ai compris son importance dans mon accomplissement personnel. On dit que Goethe, un jour, ébloui par la beauté de la campagne suisse, s’écria : «Marche et tu deviendras meilleur!» «Quand je marche, tout marche!», me confiait un jour quelqu’un. Combien de fois, ai-je moi-même expérimenté le pouvoir de métamorphose de la marche dans la nature !

Mon plus lointain souvenir remonte à mon adolescence. Je me souviens d’être parti un beau matin d’été, entre deux rangées d’arbres, la jeunesse au cœur, mon petit baluchon de rêve et l’appel de l’infini. Il y avait en moi un tel sentiment d’espérance et de bonheur que je crois avoir éprouvé pour la première fois l’émotion spirituelle. C’était l’un de ces moments d’une rare intensité, qui ouvre à des niveaux de conscience insoupçonnés. Et pour cause!

«C’est en poète que l’homme habite cette terre», écrit Friedrich Hölderlin. En accordant son rythme à celui de la nature, nous entrons dans un processus qui favorise le «dynamisme» mental et physique, car nous puisons à la source même où tout se renouvelle et se perpétue. Cette manière de vivre permet d’accéder au calme et à la sérénité. Vivre ainsi confère à la vie un sens nouveau. À l’instar de Nietzsche, nous pouvons nous interroger : «Qu’est-ce que la beauté sinon le reflet aperçu par nous d’une joie extraordinaire de la nature, parce qu’une nouvelle et féconde possibilité de vie vient d’être découverte?» La nature devient ainsi une puissante consolatrice, apportant chaque fois à la personne de nouvelles espérances.

Tout paysage comporte une part humaine et une part d’éternité. Nous prenons conscience que la nature n’est pas seulement une entité matérielle, mais qu’elle recèle des trésors de sens. Elle nous autorise, par exemple, à se dire : «Devant tant de lumière et de beauté, comment peut-on parier sur le non-sens de la vie?» Ou encore : «Comment peut-on croire en l’absurdité de l’existence?» Je ne connais pas de meilleur antidote aux sentiments d’angoisse et d’absurdité. Dans les moments de grandes lassitudes, la nature est toujours là pour nous ouvrir son réservoir de sérénité. Chaque fois, elle nous gratifie de son immense prodigalité et nous fait comprendre jusqu’à quel point, dans la vie, «tout est grâce».

Et cette grâce réside d’abord dans le courage d’être qu’elle communique généreusement. Combien de fois la vie ressemble à un pari sur le destin ! Elle semble alors nous dire : «Marche même si tu ne laisses pas de trace.» Comme le marcheur dans le sable du désert dont les pas sont effacés par le vent. Pas de traces derrière soi, pas de chemin tracé devant. Une marche où chaque pas est à inventer. Une marche où «l’important, comme dit la sagesse tibétaine, est de marcher selon la longueur de ses pas.»

Jean-Paul Simard

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Le bonheur d’une vie simple et tranquille

        «Vivre simplement, c’est apprendre à faire la différence entre assez et trop.»
                          Mark A. Burch  La Voie de la simplicité pour soi et la planète

 


 LANZA DEL VASTO, dans son livre intitulé Le pèlerinage aux sources, raconte l’expérience suivante. Un jour qu’il avait laissé ses vêtements sur la plage pour se baigner, il s’aperçut à son retour que le mouchoir noué où il serrait son mince pécule de voyageur avait disparu. Il fut pris de panique: seul, sans la moindre ressource, au cœur du continent indien! Puis, soudain, il éclate de rire, pensant qu’il vient de comprendre qu’il vit l’un de ces rares moments où il ne doit compter que sur sa richesse intérieure.


LA VRAIE RICHESSE, c’est ce qui reste quand on a perdu tout son argent.  Pour la découvrir, rien n’est meilleur que le sort quand il nous met aux prises avec la nécessité toute nue, nous obligeant à tout attendre de soi, de sorte que la vie devient une perpétuelle création de soi-même par soi-même. Pour vivre une telle expérience, il faut évidemment faire le choix d’une vie axée non pas uniquement sur la culture de l’avoir, mais sur celle de l’être.

Et cela commence par sacrifier «les nécessités inutiles», comme l’enseigne le célèbre personnage d’Hemingway, Mark Twain. Beaucoup de choses que nous conservons nous sont rarement utiles. Ce sont des poids que nous traînons derrière nous et qui minent inexorablement notre potentiel d’énergie, sans compter qu’ils appauvrissent notre existence au lieu de l’enrichir. Dans ces conditions, «jeter» ou «se débarrasser» devient pratiquement un acte existentiel.

 Jean-Paul Simard

 


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Avoir confiance dans la vie

d59c60e6569e4e1a03793683b77abd6f_w194ON ENTEND SOUVENT DIRE : Aie confiance dans la vie », «Fais confiance au destin!» La confiance est une attitude indispensable pour vivre. Sans la confiance nous n’avancerions pas d’un mètre. La vie comporte des risques, mais c’est la confiance qui nous fait avancer.


La confiance est une réalité complexe. Elle suppose certaines attitudes comme l’abandon, l’optimisme, l’espoir, le «lâcher-prise». Par exemple, l’apprenti en parachute qui veut faire sa première descente doit croire en son instructeur et en son équipement, mais s’il a peur de sauter dans le vide, il lui faudra développer la confiance. Il en est ainsi dans la vie. Il faut tantôt se lancer dans le vide avec foi et confiance comme le parachutiste, tantôt faire des pas en avant comme le marcheur de randonnée.

La confiance du parachutiste est liée à l’expérience du vide. Le vide, c’est ce qui se produit quand les points de repère se dérobent et que nous ne savons pas où nous allons atterrir. Nous avançons dans la nuit, sans savoir où nous allons. Nous éprouvons alors le vertige de l’inconnu qui emprunte les multiples visages de la peur, de l’anxiété, de l’angoisse et parfois du désespoir.

La confiance du marcheur quant à elle est liée à la morphologie du terrain. La route n’est pas toujours sereine. Elle engage le souffle, la fatigue, la volonté, le courage. Les blessures sont souvent le pain quotidien du marcheur, car il y a les pierres d’achoppement et parfois de grosses pierres, si grosses qu’elles apparaissent des montagnes.

Comme on le voit, la confiance repose sur des valeurs qui constituent les assises même de notre vie. Des valeurs qui germent autant dans le champ du quotidien que dans le jardin de l’absolu. Et ces valeurs peuvent se résumer en la foi : la foi en soi-même, la foi en l’autre et la foi en l’Autre. Cette foi est la pierre angulaire de notre humanité, en même temps qu’elle crée une amplitude qui s’ouvre sur l’infini. Elle donne la capacité de trouver des solutions profanes et spirituelles aux problèmes de la vie.


On peut comprendre pourquoi la confiance s’avère plus qu’un talisman auquel on confère un pouvoir protecteur. En ce domaine, rien de vraiment magique ou d’acquis. Il existe dans la confiance une grande part de responsabilité. Nous sommes responsables de notre destin. Celui-ci dépend de ce que nous faisons ou de ce que nous aurons fait de notre vie. De la façon dont nous l’aurons façonné au cours de notre existence. Nous sommes entièrement responsables de nos actes. Nous ne pouvons rejeter la responsabilité sur autrui ou sur autre chose. Nous devons assumer nos propres choix. Faire confiance en la vie, c’est créer sa propre existence. Le succès dépend alors du degré de confiance que nous y investissons.

Ici, nous pouvons pécher par manque ou par excès de confiance. Emportés par une immense confiance, nous pouvons surévaluer le pouvoir de notre raison. Nous en arrivons à penser que l’esprit peut tout. Que grâce à notre seule force mentale, nous pouvons maîtriser tous les événements de la vie. Nous retrouvons ici l’idéologie véhiculée derrière ces slogans : «Votre esprit peut tout», «La puissance de votre mental peut venir à bout de tout», etc. Ces slogans visent à faire de la personne un surhomme ou une superfemme qui défie les lois de la nature et de la vie. Quelqu’un donnait à ce propos l’exemple suivant: imaginez un homme sans imperméable ni parapluie à l’époque de la mousson en Inde et qui prétendrait : à force de volonté, je finirai par marcher dans la rue sans être mouillé. N’est-ce pas insensé?


La confiance n’amène pas à défier les lois de la vie, mais à estimer ses capacités à l’aune de ses possibilités. S’estimer, c’est évaluer ses capacités, mais c’est aussi d’abord et avant tout s’apprécier à sa juste valeur. Nous retrouvons ici le mot le plus important de la confiance, celui de l’estime de soi.

 Jean-Paul Simard

 


POUR ALLER PLUS LOIN :

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Qu’est-ce que réussir dans la vie ?

58838_946060335474150_6434432549926708244_nQU’EST-CE QUE RÉUSSIR DANS LA VIE vie ? Quand je fais le bilan de ma propre vie, je constate avec étonnement que les plus belles réussites l’ont souvent été après un échec, parfois retentissant. Combien ont connu dans l’échec une expérience capitale et féconde? Combien ont trouvé leur vocation dans l’échec? Combien ont trouvé le véritable amour après été plaqué? Combien ont trouvé la liberté et la vie à la suite d’un divorce? Combien sont devenus sages après que leur banque leur eu coupé les vivres? Combien d’alcooliques sont sortis de l’enfer de l’alcool après avoir tout perdu? Nombreux sont les échecs qui ont ouvert la voie à des aspirations jusque-là invisibles. Dans ces conditions, on peut se demander si l’échec ne serait pas un mal pour un bien? Ce qui nous amène à penser que pour certaines personnes échouer est peut-être la seule façon de réussir.

Il y a de nombreuses situations dans la vie où l’adage «Qui perd gagne» se vérifie. Prenons l’adage à l’inverse. Combien ont perdu en gagnant! Tel ce monsieur qui, en devenant millionnaire à la loterie, a littéralement dégénéré, au point qu’il est devenu une loque humaine. Un autre pensait avoir rencontré l’être de sa vie et avoir atteint la région bienheureuse où l’être aimé ne peut plus faire de mal, et pourtant il a subi l’irréparable outrage. Grâce à cet échec amoureux, il a pourtant été soustrait à un destin d’incompréhension et de solitude dans lequel il s’embarquait aveuglément. Dans combien de circonstances et d’événements, la loi de la survie s’exprime en déroutant ?

Bien sûr, il ne s’agit pas ici de souhaiter l’échec, mais de comprendre que ce sont souvent les occasions les plus susceptibles de nous faire perdre confiance dans la vie qui sont souvent les plus bénéfiques. Comme il est vrai et inspirant cet adage zen qui dit : Celui qui a atteint son but a manqué tout le reste…

Jean-Paul Simard

 


RÉFÉRENCE :

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Qui perd gagne !

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IL Y A DE NOMBREUSES SITUATIONS dans la vie où l’adage «Qui perd gagne» se vérifie. Prenons d’abord l’adage à l’inverse. Combien ont perdu en gagnant! Tel ce monsieur qui, en devenant millionnaire à la loterie, a littéralement dégénéré, au point qu’il est devenu une loque humaine. Un autre pensait avoir rencontré l’être de sa vie et avoir atteint la région bienheureuse où l’être aimé ne peut plus faire de mal, et pourtant il a subi l’irréparable outrage. Grâce à cet échec amoureux, pourtant, il été soustrait à un destin d’incompréhension et de solitude dans lequel il s’embarquait aveuglément. Dans combien de circonstances et d’événements, la loi de la survie s’exprime en déroutant.

Voici un fait qui n’est pas banal. Le 1er juin 2009, un avion d’Air France transportant 228 passagers s’abîme dans l’Océan Atlantique, entre Rio de Janeiro et Paris. L’avion est pulvérisé et l’on se perd en conjectures sur la cause de l’accident. Le lendemain, les journaux parlent d’un couple de Français miraculé. Miraculé? Non pas parce que ce couple est sorti vivant du «crash», mais parce que, avant son départ, ce couple avait tenté en vain d’échanger des billets pour pouvoir embarquer sur ce vol. Inutile de dire combien ils étaient heureux de ce contretemps. Chanceux dans leur malchance, comme dit la sagesse populaire. L’échec leur avait sauvé la vie!

Si vous pouviez lire en filigrane à travers tout événement manqué de votre vie, vous seriez étonnés de savoir ce qui serait arrivé si vous aviez réussi. Non pas qu’il faille souhaiter l’échec et courir après lui. L’échec n’est pas à rechercher. Paradoxalement, cependant, l’échec possède une dynamique parfois aussi forte que le succès. On a parlé avec raison de la pédagogie de l’échec. L’échec est souvent la seule façon de nous enseigner ce que nous avons vraiment besoin de savoir sur la vie.

Jean-Paul Simard