LE SENS COMME REMÈDE AUX MAUX DE L’EXISTENCE
LA SANTÉ REQUIERT QUE NOTRE VIE AIT UN SENS. La capacité de donner un sens aux événements est ce qui rend la personne la plus apte à faire face aux problèmes et aux difficultés de la vie.
Et ce sens est fortement tributaire des réponses apportées aux grandes questions existentielles : la vie vaut-elle la peine d’être vécue? A-t-elle une signification? A-t-elle une finalité? Combien de souffrances, de maladies, de dépressions prennent racine dans l’absence de réponses à ces questions fondamentales.
Le sens est un besoin vital
NOUS ÉPROUVONS UN BESOIN VISCÉRAL de sens comme nous avons besoin d’eau, d’air, de lumière, de nourriture. Quand nous ne trouvons pas le sens d’une chose, d’un événement, quand nous ne comprenons pas ce qui nous arrive, nous nous sentons démunis, insécurisés. L’angoisse alors s’installe et le premier réflexe est de paniquer. On veut comprendre pourquoi ? C’est bien normal.
Toutes les personnes qui œuvrent auprès des malades vous le diront, la question qui revient le plus souvent, consciemment ou inconsciemment, est la suivante: « Quel est le sens de ce qui m’arrive ? » Une personne malade disait : «Trouver une explication, comprendre comment et, surtout, pourquoi je suis tombée malade. C’est tout ce que je voulais.»
Jocelyne Benoit qui accompagne des malades en phase terminale fait le même constat : «J’ai observé, dit-elle, que les mêmes questions reviennent souvent. Les gens me demandent ce que ça leur a donné de vivre.» L’importance du sens est corroborée par un psychothérapeute qui affirme : « Guérir le client, ce n’est pas lui remplir la tête de connaissances psychologiques ou biologiques. Le guérisseur découvre sa mission quand il donne un sens à la maladie[i]. »
Le sens n’est pas l’explication
J’AI VÉCU UN JOUR un fait qui m’a beaucoup interpellé. Il s’agit d’un appel téléphonique que je reçus de l’un de mes anciens élèves. Il était angoissé. Deux ans auparavant, il avait été victime d’un accident d’automobile pour lequel il n’était aucunement responsable. Il s’interrogeait sur le destin qui avait été si ingrat et si cruel envers lui. Il comprenait son état, car les médecins lui avaient très bien expliqué pourquoi il ne pourrait plus marcher. Ce qu’il ne comprenait pas, c’était la raison pour laquelle la fatalité s’était si malencontreusement immiscée dans son destin. Il se demandait pourquoi il était cloué à un fauteuil roulant, dans la fleur de l’âge, si loin de ses rêves et de ses projets d’avenir.
Je passai quelque temps avec lui, mais je demeurai impuissant à le consoler. Je compris cependant, à travers cet événement, une chose importante: trouver un sens à la souffrance, ça va; trouver un sens à sa souffrance, ce n’est pas évident. Que répondre, par exemple, à la question du pourquoi? «Pourquoi moi ?». Ou encore: «Qu’ai-je fait pour mériter cela ?». «Quel est le sens de ma souffrance, de ma maladie ?». «Pourquoi est-ce que je souffre ? Les autres marchent, pourquoi est-ce que je suis immobilisé ? Les autres rient, courent, travaillent, jouissent de la vie, accomplissent leur carrière. Qu’est-ce qui m’est arrivé ?».
La médecine s’occupe du «comment» mais pas du «pourquoi»
LE PSYCHANALYSTE TOBIE NATHAN constate qu’un médecin, à la question «Pourquoi ai-je mal?» peut répondre par quelque chose du genre «Parce que vous avez une fracture à la jambe!» Mais il ne peut jamais répondre à des questions du genre «Pourquoi est-ce moi qui suis tombé de l’arbre et non mon frère, ou mon cousin?» «Pourquoi suis-je tombé de l’arbre précisément ce jour-là?» Il est difficile de répondre à ces questions parce qu’elles invitent à construire un sens.
Sylvie Lafrenaye, pédiatre spécialisée en soins intensifs, doit régulièrement faire face à ces questionnements. Elle avoue : « En médecine et en science, on est excellents dans le « comment ». Comment c’est arrivé, comment ça se fait que l’antibiotique ne fonctionne pas… Mais on n’a pas de réponse au « pourquoi », alors on l’élude, explique-t-elle. »
Jean-Paul Simard
POUR EN SAVOIR PLUS :
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[i] Les témoignages des personnes que nous donnons ici sont extraits de la revue « Spiritualité santé», « Le guérisseur blessé », vol. 1, no 1, automne 2008, p. 28-29.